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Salvador Allende, le président socialiste du Chili, renversé il y a quarante ans

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Jeune journaliste jadis en poste à Santiago du Chili, Thomas Huchon a voulu cerner la personnalité de Salvador Allende, le président socialiste renversé par le général Augusto Pinochet, le 11 septembre 1973, il y a quarante ans. Les éditions Eyrolles viennent de sortir une nouvelle édition de son ouvrage Allende, c'est une idée qu'on assassine (224 p., 18 euros).

A l'époque, l'expérience de la gauche chilienne avait été suivie avec beaucoup d'enthousiasme en France.

Les Français plaçaient alors leurs espoirs dans l'union de la gauche, et le Chili semblait plus proche que le Front populaire, dans le temps si ce n'est dans l'espace.

L'image du palais présidentiel de La Moneda en flammes et le suicide d'Allende furent donc des événements traumatisants pour la gauche française.

Le secrétaire général du Parti communiste, Georges Marchais, s'empressa de souligner que "le Chili n'est pas la France".

La solidarité avec les réfugiés chiliens s'exprima partout dans l'Hexagone. Le nom d'Allende inscrit sur les plaques des rues ou le fronton des écoles en témoigne encore. Salvador Allende est désormais coulé dans le bronze des monuments et figure en bonne place dans le panthéon de la gauche.

Difficile de retrouver l'homme derrière le mythe, à moins de procéder à une recherche historique. Thomas Huchon a choisi d'évoquer le président chilien au travers de témoignages d'une vingtaine d'amis, collaborateurs ou alliés d'Allende. Un opposant, le démocrate-chrétien Patricio Aylwin, qui sera ensuite le premier président élu après le retrait des militaires, complète le tableau.

Le double visage du président chilien

L'auteur a découvert "un personnage historique fascinant, et un homme assez déroutant, plein de contradictions". Au point de provoquer une sorte de dédoublement, entre l'homme Salvador et le politique Allende, dont les rapports ne semblaient pas toujours évidents. Ainsi, le gentilhomme tiré à quatre épingles, séducteur et facétieux, coexistait avec le redoutable parlementaire et représentant des secteurs populaires. Le légaliste non violent faisait bon ménage avec le partisan d'une transformation révolutionnaire.

"Ce que j'imaginais comme un travail de mémoire sur un personnage historique prenait parfois la tournure d'un mélodrame politique, dans lequel les convictions se mêlaient à l'amour pour un leader qui refusait en façade le culte de la personnalité", avoue l'auteur.

A vrai dire, aucun des interlocuteurs de Thomas Huchon n'a vraiment été déloyal. Mémoire ou histoire, le genre biographique a ses raisons, qui tendent à effacer l'œuvre derrière le personnage. La psychologie prend le dessus sur la politique d'autant plus facilement que chacun y va de son anecdote et de sa confidence. Chassée par la porte, l'hagiographie revient par la fenêtre. Dommage, car l'alliance entre le centre et la gauche chiliennes, citée à deux reprises dans l'ouvrage, ne se trouve nulle part explicitée ou analysée dans le livre. Elle a cruellement manqué à Allende, plombé par la gauche avant d'être crucifié par la droite militaire.

C'est justement la convergence entre le centre et la gauche qui a permis la transition au Chili entre la dictature et la démocratie, et vingt ans d'avancées sociales. La nécessité d'une coalition avec le centre est aujourd'hui une évidence pour la gauche de gouvernement dans une bonne partie de l'Amérique latine, qui a tiré les leçons de l'échec d'Allende. Même si une telle alliance reste taboue en France, où une gauche métaphysique continue à se poser la question de "qu'est-ce qui est et n'est pas de gauche". Comme disait l'autre, la France n'est pas le Chili.

Le documentaire Allende, c'est une idée qu'on assassine (Upside Télévision), réalisé par Thomas Huchon, sera diffusé sur la chaîne Public Sénat les 9, 14, 15, 16, 21 et 22 septembre.

Sciences Po organise un colloque international, "Chili, 11 septembre 1973 : un événement mondial", les 17, 18 et 19 septembre, à Paris, en collaboration avec l'Institut des hautes études d'Amérique latine, l'Institut des Amériques et l'université de Versailles-Saint-Quentin. Parmi les participants figurent Manuel Antonio Garreton, Jacques Chonchol, Alain Touraine et Armand Mattelart.


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